L'EVENEMENT DU JEUDI- 3 au 9 décembre 1998
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Rémy Tassou : artiste "cybertrash"

Dans la journée, Rémy Tassou, 44 ans, travaille dans la finance. Mais la nuit tombée il déambule dans les rues de Paris à la recherche de cadavres de micro-ordinateurs ou d'appareils électroniques abandonnés sur le trottoir. Les machines qui fonctionnent ne l'intéressent pas : "Je préfère me pencher sur elles lorsqu'elles ont rendu l'âme, pour les dépouiller, me nourrir de leurs entrailles et les libérer de leur chape cybernétique".
En clair, cet artiste "cybertrash" récupère des milliers de composants et les relie les uns aux autres pour composer sculptures murales et totems colorés.
"Je m'extasie sur leur beauté intérieure, car certains composants frôlent l'orfèvrerie". On comprend mieux pourquoi l'artiste rêve secrètement de pouvoir "trasher" un satellite ou du matériel électronique militaire pour lesquels l'or et le platine sont fréquemment utilisés. Pour l'heure, Rémy doit souvent se contenter d'un vieil Apple ou d'un PC 386. "J'ai l'impression d'effectuer un retour vers le futur permanent. Ce que je ramasse appartient déjà au passé et je vais sans doute devoir attendre une petite dizaine d'années avant de trouver un écran à plasma ou un IMac sur le trottoir!" Du coup, ses sculptures font aussi figure de "mémoire de l'électronique". Une mémoire universelle.
"Je trouve de tout, des microprocesseurs singapouriens, portugais, anglais, allemands, mexicains..."
On s'étonnerait presque que le seul artiste cybertrash sur Terre soit un Français, car "le "made in France", lui est quasi inexistant" souligne-t-il, amusé.

Julien Kostrèche